Pour Chadli Si-Mohamed, « Mon Maroc à moi. Episode 1 » est l’expression de son attachement profond envers le Maroc. Par des plans larges de paysages naturels, un travail sur l’ombre et la lumière, il tente de capturer ses vibrations.
Rencontre
E-taqafa : Pourquoi le titre « Mon Maroc à moi. Épisode 1 » ?
Chadli Si-Mohamed : Le choix du titre « Mon Maroc à moi, épisode 1 » revêt une signification profonde et multiple pour moi en tant qu’artiste. Tout d’abord, il émane de ma perspective personnelle et de mon lien intime avec le Maroc, pays qui a façonné mon identité et influencé ma manière de voir le monde.
Chaque photographie de cette exposition est une pièce de mon histoire personnelle, un épisode qui capture un moment, un lieu ou une émotion spécifique vécue au Maroc. En séquençant ces moments à travers différents épisodes, je raconte une histoire, une narration séquentielle de mon expérience avec ce pays riche en histoire, en culture et en beauté.
« Mon Maroc à moi, épisode 1 » est à la fois une expression personnelle de mon lien avec le Maroc, une invitation à la réflexion et à la résonance individuelle pour les spectateurs, et une indication que cette série est le commencement d’une exploration plus étendue de mon regard sur mon pays.
E-taqafa : Quelle est votre approche artistique pour la prise de vue ?
Chadli Si-Mohamed : Mon approche artistique pour la prise de vue photographique est profondément influencée par les grands maîtres de l’agence Magnum, tels que Robert Capa, Henri Cartier-Bresson, George Rodger… À l’image de ces visionnaires, je crois en l’instant décisif, en capturer le moment précis où l’émotion, la composition et la narration se rejoignent de manière harmonieuse. C’est à travers ce prisme que je façonne « Mon Maroc à moi, épisode 1 ». Mon regard sur les éléments, qu’ils soient naturels ou humanisés, guide le déclenchement de l’obturateur.
L’instantanéité est au cœur de ma démarche. Je recherche l’authenticité dans chaque image, cherchant à encapsuler non seulement l’apparence visuelle, mais aussi l’essence émotionnelle du moment. Cette approche me permet de créer des photographies qui transcendent le simple enregistrement visuel pour raconter des histoires, évoquer des sentiments et capturer l’âme même du Maroc, tel que je le ressens à chaque retour dans ce pays qui me tient à cœur.
E-taqafa : Comment concevez-vous la perspective dans vos photographies ?
Chadli Si-Mohamed : La conception de la perspective dans mes photographies est le résultat d’une réflexion approfondie sur la composition visuelle et de l’influence de mon regard personnel.
L’utilisation délibérée de plusieurs plans dans mes photographies, notamment les prises de vue en plan large, est une stratégie que j’emploie pour offrir une immersion complète dans l’environnement capturé. Cela permet au spectateur de percevoir les détails tout en ayant une vue d’ensemble, créant ainsi une expérience visuelle plus riche et nuancée.
Lorsque je m’approche davantage de mon sujet avec des gros plans, je veille à conserver un second plan défini. Cette approche vise à offrir une perspective et une profondeur, tout en évitant de noyer l’élément central dans un trop-plein d’informations visuelles. Chaque élément de l’image, qu’il soit en premier ou en arrière-plan, joue un rôle crucial dans la narration visuelle que je souhaite transmettre.
E-taqafa : Un travail sur le clair-obscur est apparent et notamment sur les ombres ?
Chadli Si-Mohamed : Le choix délibéré d’explorer le clair-obscur dans mes photographies, en mettant particulièrement l’accent sur les ombres, découle de ma volonté de créer une expérience visuelle unique pour le spectateur. En mettant en avant ces jeux de lumière, j’invite le spectateur à explorer activement chaque image, à rechercher les détails subtils à la frontière de ces deux tonalités. Le clair-obscur offre également une dimension narrative à mes photographies, évoquant des émotions et des histoires qui peuvent être aussi variées que complexes. En laissant une partie de l’image dans l’ombre, j’encourage le spectateur à participer activement à l’interprétation de la scène, l’invitant à créer sa propre narration et à découvrir les détails qui émergent de cet équilibre entre la lumière et l’obscurité. Ainsi, mon travail sur le clair-obscur vise à stimuler l’imagination du spectateur tout en soulignant la beauté intrigante de chaque instant capturé.
E-taqafa : Pourquoi cette attirance pour les beaux paysages marocains ?
Chadli Si-Mohamed : Mon attirance pour les beaux paysages marocains découle d’une profonde admiration pour la diversité exceptionnelle de ce pays. Le Maroc, avec ses multiples paysages, est une source infinie d’inspiration. Que l’on se trouve au nord, baigné par la mer Méditerranée et l’océan Atlantique, ou au sud, touchant l’immensité du Sahara, chaque coin du pays offre des panoramas à couper le souffle.
L’attrait pour ces paysages ne se limite pas seulement à leur esthétique visuelle, mais aussi à la richesse de leur signification culturelle. Les paysages naturels, qu’ils soient en plein désert, au bord de l’océan, ou dans les montagnes, sont le reflet de l’histoire du Maroc et représentent de véritables œuvres d’art, allant des montagnes majestueuses aux oasis luxuriantes, des plages de l’Atlantique aux dunes infinies du désert.
E-taqafa : Vous privilégiez également les couleurs dans vos photographies, pourquoi ?
Chadli Si-Mohamed : Effectivement, dans l’exposition « Mon Maroc à moi, épisode 1 », j’ai fait le choix délibéré de privilégier la couleur, une décision qui diffère de ma préférence habituelle pour le noir et blanc. Cette évolution découle d’une volonté de capturer la vitalité et la diversité vibrante des paysages marocains.
Ainsi, en privilégiant la couleur dans cette exposition, mon objectif est de faire ressortir les scintillements et les nuances qui caractérisent les paysages marocains. La couleur ajoute une dimension sensorielle et émotionnelle, invitant le spectateur à ressentir la chaleur des paysages, la fraîcheur de la mer, et l’authenticité des médinas d’une manière qui va au-delà de ce que le noir et blanc aurait pu offrir.
E-taqafa : Dans la photographie « Chefchaouen bi Lail », un travail minutieux sur les couleurs est appliqué, est-ce une nouvelle voie pour vous ?
Chadli Si-Mohamed : En effet, la photographie « Chef-chaouen bi Lail » (Chefchaouen la nuit) représente une nouvelle voie pour moi, une exploration passionnante des subtilités des couleurs dans des scènes nocturnes. Cette incursion dans la photographie de nuit est à la fois stimulante et enrichissante. Dans « Chefchaouen bi Lail », j’ai délibérément choisi de ne pas faire appel à d’autres sources de lumière que celles naturellement présentes dans la ville, afin de capturer l’authenticité de la nuit et d’exprimer la magie qui émane de ces scènes.
Ce projet représente donc une nouvelle voie pour moi, où je m’immerge dans les défis techniques et artistiques de la photographie nocturne. L’utilisation minutieuse des couleurs dans cette série a nécessité une approche différente, impliquant une sensibilité accrue à la lumière ambiante, une gestion précise des paramètres tels que l’ouverture, la vitesse, la sensibilité, le mode manuel de prise de vue, etc.
E-taqafa : Que représente pour vous cette exposition à l’Espace Rivages ?
Chadli Si-Mohamed : Cette exposition à l’Espace Rivages revêt une signification très particulière pour moi, à la fois sur le plan personnel et professionnel. Tout d’abord, je tiens à exprimer ma profonde gratitude envers la Fondation Hassan II pour les MRE. Son soutien constant envers les Marocains résidant à l’étranger (MRE) est inestimable et la création de l’Espace Rivages en est un bel exemple.
Cet espace représente bien plus qu’un simple lieu d’exposition. C’est un espace convivial, quasiment familial, qui offre aux artistes MRE une plateforme exceptionnelle pour partager leur travail et faire connaître leur art. Je tiens à exprimer ma plus profonde reconnaissance envers le personnel dévoué de la galerie, toujours à l’écoute et travaillant à créer les conditions optimales pour la présentation des œuvres.
Propos recueillis par Fatiha Amellouk
Pour e-taqafa.ma